Penser à lâcher son bébé, penser à ce qu’il se passerait si on se plantait le couteau de cuisine… Ce sont des pensées intrusives.
Les pensées intrusives, ce sont ces petites phrases qui surgissent sans prévention. Parfois effrayantes, elles peuvent nous traverser l’esprit sans raison apparente. Vous êtes en train de marcher sur un pont et, soudain, une pensée surgit : « Et si je sautais ? « .
Ou bien vous tenez votre bébé, et votre cerveau vous murmure : « Et si je le lâchais ? « . Vous n’êtes pas seul à avoir ce genre de pensées. Ces pensées, qualifiées « d’intrusives », sont bien plus courantes qu’on pourrait le croire.
Dans cet article :
1. Que sont les pensées intrusives ?
Les pensées intrusives sont des pensées, des images ou des pulsions qui surgissent de manière incontrôlable. Elles sont souvent violentes, angoissantes ou absurdes.
Contrairement aux idées que nous générons volontairement, ces pensées-là apparaissent sans invitation, à l’opposé de ce que nous ressentons ou de ce que nous voulons.
Elles se produisent souvent dans des moments banals, sans contexte particulier : vous cuisinez et vous pensez soudain à renverser la poêle brûlante, ou vous conduisez et imaginez un accident.
Ces pensées peuvent être désagréables et provoquer un certain malaise. Cependant, elles ne signifient rien de ce que vous êtes réellement ou de ce que vous voulez faire.
Des études en psychologie montrent que 94 % des gens admettent avoir des pensées intrusives à un moment ou un autre.
Les experts soulignent que ces pensées sont en réalité normales, même si leur contenu semble extrême ou effrayant. Vous n’êtes donc pas seul à avoir ce genre de pensées étranges, qui vous font souvent honte.
2. Pourquoi avons-nous des pensées intrusives ?
Les pensées intrusives sont en partie un produit du fonctionnement de notre cerveau. Les chercheurs ont longtemps étudié pourquoi ces pensées se produisent, et il s’avère qu’elles sont liées à la manière dont notre cerveau traite l’information.
Notre cerveau génère en permanence des idées et des images, même en arrière-plan, pour réagir aux situations ou pour anticiper ce qui pourrait se passer.
Certaines théories, comme celles développées par le neuroscientifique David Eagleman, suggèrent que ces pensées pourraient être le résultat de notre cerveau qui nous « teste ».
Dans un monde complexe, notre esprit essaie de prévoir toutes sortes de scénarios, même les plus invraisemblables, pour se préparer à toute éventualité.
Selon cette logique, les pensées intrusives pourraient être des échos de cette préparation, des simulations qui nous offrent à « tester » des possibilités, même si elles n’ont rien à voir avec notre comportement réel. C’est encore plus vrai si vous souffrez d’anxiété car vous avez l’habitude de construire de scénarios dans votre tête.
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3. Quand les pensées intrusives deviennent-elles problématiques ?
Pour la plupart des gens, les pensées intrusives sont passagères et n’affectent pas la vie quotidienne. Cependant, pour certaines, elles peuvent devenir envahissantes.
Lorsqu’elles reviennent régulièrement et provoquent de l’angoisse, elles peuvent être associées à des troubles comme les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) ou les troubles anxieux.
Une étude réalisée par le Dr Christine Purdon, chercheuse en psychologie clinique, a démontré que les personnes souffrant de TOC ont tendance à accorder beaucoup plus d’importance à leurs pensées intrusives, les percevant comme des menaces ou des signes de danger.
Cette interprétation crée un cercle vicieux : plus la personne tente d’éviter ou de contrôler ces pensées, plus elles deviennent envahissantes et source de stress.
Dans ces cas, les pensées intrusives peuvent générer des comportements d’évitement ou des rituels censés « neutraliser » les pensées (comme vérifier plusieurs fois que la porte est bien verrouillée). Si vous vous reconnaissez dans cette description, il peut être utile d’en parler à un professionnel de la santé mentale pour apprendre des stratégies de gestion adaptées.
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4. La clé : dédramatiser les pensées intrusives
Avoir des pensées intrusives ne fait pas de vous une « mauvaise personne » ou quelqu’un de dangereux. Le contenu de ces pensées n’a rien à voir avec qui vous êtes. C’est une distinction essentielle que de nombreux psychologues mettent en avant : une pensée n’est qu’une pensée. Elle n’a aucun pouvoir, elle ne définit pas vos valeurs ni vos intentions.
En 2005, une étude de l’Université de Concordia au Canada a révélé que les personnes qui parviennent à mieux gérer leurs pensées intrusives sont celles qui acceptent ces pensées sans chercher à les repousser.
Cela peut sembler contre-intuitif, mais plus vous luttez contre une pensée intrusive, plus elle s’installe. C’est un phénomène que l’on appelle l' »effet rebond » : en tentant de supprimer une pensée, on ne fait que renforcer sa présence. La clé est donc d’apprendre à reconnaître ces pensées sans jugement, en les laissant passer comme des nuages dans le ciel.
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5. Comment gérer les pensées intrusives au quotidien ?
Pour la plupart des gens, les pensées intrusives sont une expérience désagréable mais passagère. Cependant, si elles deviennent envahissantes, voici quelques conseils pour les gérer sereinement.
- Reconnaître que c’est une pensée, pas une vérité. Il est important de se rappeler qu’une pensée intrusive ne dit rien sur vous. Ce n’est qu’une image ou une phrase qui traverse l’esprit, sans signification réelle.
- Ne pas chercher à la contrôle. Les études montrent que le contrôle intensif de ces pensées peut empirer les choses. Essayez de les observer sans réagir, en vous rappelant qu’elles passeront d’elles-mêmes.
- Pratiquer la pleine conscience. La méditation et les exercices de pleine conscience permettent de calmer le flux de pensées. Ils permettent d’accueillir les pensées intrusives sans qu’elles ne prennent trop de place. La pleine conscience renforce la capacité à rester ancré dans le présent, ce qui aide à ne pas se laisser emporter par des pensées perturbantes.
- Parler de ses pensées avec un professionnel. Si les pensées intrusives deviennent un véritable problème, il peut être bénéfique d’en parler à un thérapeute ou un conseiller. Il existe des thérapies spécifiques, comme la thérapie cognitive et comportementale (TCC), qui ont montré leur efficacité pour aider les individus à gérer les pensées intrusives et à réduire l’anxiété associée.
Au final, les pensées intrusives ne sont que des pensées passagères. Elles ne sont pas des commandements ni des vérités à interpréter. Elles peuvent être laissées là, sans réaction particulière, comme un bruit de fond qui finit par s’estomper. Et si, au lieu de lutter contre elles, nous apprenons à lâcher prise, à les laisser flotter sans les nourrir ?
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