Pourquoi voit-on tous la même plante chez soi ? La monstera, star des intérieurs, cache une tendance bien plus profonde qu’il n’y paraît.

Depuis quelques années, il devient difficile de mettre un pied dans un appartement, un restaurant ou un bureau sans tomber nez à nez avec une monstera, une calathea ou une pilea. Ces plantes d’intérieur aux feuillages spectaculaires semblent avoir envahi nos vies, comme si tout le monde s’était passé le mot. Hasard ou phénomène de société ? En réalité, cette jungle urbaine trouve ses racines dans un mélange savamment dosé de tendances, de marketing, de nostalgie… et de réseaux sociaux.
Dans cet article :
Le grand retour des plantes : une tendance qui ne date pas d’hier
Si les plantes vertes connaissent aujourd’hui un engouement sans précédent, leur retour en grâce ne s’est pas fait en un jour. Selon Manuel Rucar, analyste des tendances végétales chez Chlorosphère, ce phénomène a réellement décollé à partir de 2015, avec un véritable boom pendant la pandémie de Covid-19. Enfermés chez eux, les Français ont cherché des moyens simples de reconnecter avec la nature… sans quitter leur salon.
D’après les chiffres de Valhor, l’interprofession du végétal, un foyer sur deux achete au moins une plante verte par an. Et toutes, ou presque, se ressemblent.
Pourquoi voit-on toujours les mêmes espèces partout ?
L’uniformité de notre jungle domestique ne doit rien au hasard. Elle est le fruit de choix pratiques, économiques, mais aussi émotionnels.
Un feuillage graphique qui tape dans l’œil
Les plantes plébiscitées ont un point commun : elles en mettent plein la vue. Leurs feuillages sont larges, marbrés, nervurés, panachés. C’est le cas de la monstera deliciosa, dont les grandes feuilles découpées évoquent une ambiance tropicale. Ou du caladium, avec ses teintes allant du blanc au rouge vif.
« Ce sont des plantes dites “de mamies”, très populaires dans les années 1970, qui reviennent en force », explique Manuel Rucar. Leur style vintage couplé à leur aspect spectaculaire plaît à une génération en quête d’authenticité… et d’esthétique Instagrammable.
Simples à cultiver, difficiles à tuer
Le deuxième critère qui uniformise nos choix : la facilité d’entretien. La plupart des jeunes acheteurs, notamment les moins de 40 ans, ne se sentent pas experts en jardinage. Ils recherchent des plantes résistantes, capables de survivre à l’oubli d’un arrosage ou à une lumière imparfaite.
Comme le résume Paul Bergain, vendeur chez Plantes pour tous, « les gens prennent certains types de plantes parce qu’ils ont peur de ne pas être assez informés, de ne pas avoir la main verte ».
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Une production industrielle qui alimente la tendance
Derrière cette popularité se cache aussi un modèle économique bien huilé. La majorité des plantes vendues en France provient… des Pays-Bas, champions européens de l’horticulture. Leur capacité de production industrielle permet de proposer des variétés tendances à bas coût, avec un volume suffisant pour inonder le marché français.
Selon les chiffres de Valhor, 63 % des plantes d’intérieur achetées en France sont importées des Pays-Bas. La France, elle, importe pour 300 millions d’euros de plantes vertes chaque année… mais n’en exporte que 8 millions. Autant dire que la production locale ne suit pas.
Et quand une plante devient trop vue ou trop produite, la saturation n’est jamais loin. C’est ce qui est arrivé au caladium, supplanté ces derniers mois par la calathea, dont les nombreuses variétés offrent elles aussi un joli panel de couleurs et de textures.
Instagram, ce jardin numérique qui dicte nos envies
La mode des plantes vertes ne serait pas ce qu’elle est sans l’influence massive des réseaux sociaux. Sur Instagram, des comptes comme @plantamaven ou @plantyclub transforment leurs intérieurs en véritables forêts tropicales chic. Le tout, bien sûr, dans une esthétique très codifiée : murs blancs, mobilier épuré, lumière douce, et plantes disposées avec soin.
Des hashtags comme #urbanjungle, #plantdaddy ou #plantmama rassemblent des millions de publications, alimentant un univers inspirant… et normé. Tout le monde veut sa monstera, sa pilea peperomioides, ou sa calathea ornata sanderiana aux nervures rosées.
« Instagram est un amplificateur des tendances », affirme Hector Demachy, fondateur de la jardinerie Belle Plante. À tel point que certaines variétés rares deviennent rapidement cultes, poussant la demande… et donc la production.
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Vers une nouvelle génération de plantes « tendance » ?
Même si la folie des plantes d’intérieur semble avoir atteint son sommet pendant le confinement, elle ne faiblit pas pour autant. Les passionnés se tournent désormais vers des variétés plus originales, comme la monstera dubia, une version plus compacte de la classique deliciosa, ou des plantes aux couleurs encore plus affirmées.
L’urban jungle continue de se renouveler. Et à défaut d’arbres dans les rues, nous avons trouvé une autre manière de vivre la nature… sur nos étagères.
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